Après la fin de la Deuxième Guerre mondiale, l’économie était en pleine expansion, en Amérique du Nord. General Motors était alors la plus grosse société au monde. Elle contrôlait près de cinquante pour cent du marché de l’automobile et était diversifiée en une foule de marchés, du climatiseur à la cuisinière.
Malgré son gigantisme, ou à cause de son gigantisme, une fois de plus, au cours des années cinquantes et soixantes, General Motors fut prise aux dépourvues devant une percée réalisée par la FoMoCo. La première fois, il s’agissait de la Ford Ranchero, lancée en 1957. Chevrolet ripostait avec la El Camino, en 1959. La deuxième fois, Ford lança la Falcon 1960, qui était beaucoup mieux ciblée sur le marché auquel elle était destinée que la Chevrolet Corvair. Chez GM, on s’empressa de copier le concept, en lançant la Chevy II, en 1962. La même année, Ford ouvrit le marché des intermédiaires, avec la Fairlane. Cette fois, les quatre divisions ripostèrent en 1964, avec la Chevrolet Chevelle, la Pontiac Tempest, la Buick Special et l’Oldsmobile F-85. Le grand coup fut donné il y a exactement cinquante ans, par la Mustang, lancée le 17 avril 1964. Au début, malgré un lancement plutôt flamboyant, et un accueil passionné par les acheteurs, chez GM, on était pleins d’expectatives, ils étaient certains que la nouvelle version de la Corvair était amplement capable de juguler la galopade du cheval fou. Puis, quand les chiffres de vente commencèrent à se compter par des centaines de milliers, en seulement quelques mois, le réveil matin sonna fortement aux oreilles des décideurs, chez GM.
Le concept étant déjà trouvé, il ne restait qu’à le copier et lui donner un nom. On avait opté pour Camaro. Les ingénieurs, chez GM, quant à eux, ne pouvaient que faire une variante du même thème. Moteur à l’avant, utilisation de pièces déjà existantes, empruntées à la Chevy II, elle-même étant une imitation de la Falcon, qui elle, avait été utilisée chez Ford, pour donner naissance à la Mustang. Même empattement de 108 pouces, comme la Mustang, utilisation de sièges baquets, dessin de la carrosserie avec un long capot et un coffre court, le tout couronné d’une longue liste d’options, afin de maximiser les sources de profits.
Le moteur et la transmission étaient fixés sur un châssis bien isolé par des coupelles en caoutchouc, afin de réduire les vibrations et le bruit. La suspension avant était composée d’une fourchette, avec des ressorts à boudin. Toutefois, les ressorts étaient situés entre le bras supérieur et inférieur de suspension. Voulant sans doute économiser, la suspension arrière était composée d’une seule lame de ressort, de chaque côté. Le problème de ce genre de suspension est sa propension à permettre aux roues arrière de sautiller, lors d’accélérations brusques. Comme ce défaut avait été découvert trop tard, la Camaro fut mise sur le marché sans modification. Afin de minimiser les sautillements, on ajouta des barres stabilisatrices, et des amortisseurs disposés de chaque côté de l’essieu, sans grande amélioration. Un autre problème de cette suspension était qu’elle était facile à faire taper au fond.
Le styliste en chef, Bill Mitchell supervisait le dessin de la carrosserie. Contrairement à la Mustang, qui avait ses tôles avec des lignes sculptées, la Camaro avait été dessinée selon une tendance qui était devenue pratiquement un dogme dans les studios de dessin de GM, à cette époque, soit de reproduire la silhouette galbée de la bouteille de Coca Cola. Cette célèbre bouteille, qui existe encore aujourd’hui, avait été dessinée par le célèbre stylicien, qui a pratiquement inventé le dessin commercial, soit le Français, Raymond Loewy.
Imitant la Mustang, la Camaro pouvait être une auto capable de répondre aux besoins de l’humble secrétaire à ceux du pilote de course. Elle débutait avec une version deux portières, à toit rigide, motorisée par le six cylindres 230 p. c. de cylindrée, passant à un six cylindres de 250 p.c., suivi du V-8 327, ou 350. Ce dernier était inclus dans une option portant le nom de Super Sport, qui comprenait également une suspension robuste, des pneus D70X14, un capot modifié et une bande blanche sur le panneau de calandre. En mi-saison, une paire de V-8 396 fut ajoutée en version 325 et 350 ch. Afin de contourner la directive interne, chez GM, qui spécifiait de ne pas fabriquer des automobiles de taille intermédiaire, motorisées par de grosses cylindrées, ces V-8 396 faisaient parties des options et étaient installés chez les concessionnaires. Ainsi, GM sauvait la face, vis-à-vis son engagement, auprès de la AMA (American Manufacturers Association) de ne pas fabriquer des autos, avec des moteurs trop puissants.
Sur cette longue liste d’options, se trouvaient également des intérieurs luxueux, une banquette arrière pliante, un levier de changement de rapports sur la console, pour la transmission automatique Powerglide, une transmission manuelle à trois rapports, ainsi qu’une à quatre rapports. L’option Rally Sport offrait des trappes pour cacher les phares avant. La liste continuait de s’allonger, avec des vitres teintées, la chaufferette, le climatiseur, le régulateur de vitesse, le toit de vinyle, des garnitures de frein métallisées, des freins à disques à l’avant, un différentiel auto bloquant, etc, etc. Un bon vendeur pouvait facilement faire grimper la facture à plus de 5 000,00 $.
Les ventes grimpèrent à 220 000 Camaro, vendues en 1967, ce qui représentait environ 10 % des ventes totales, de la Division Chevrolet. Ce chiffre inclut les 100 copies de la voiture officielle du Indy 500 et les 602 Z-28.
Les ventes augmentèrent de 15 000 exemplaires, en 1968, avec très peu de changements sur la voiture. Ces changements comprenaient les nouveaux feux latéraux imposés par les ministères des Transports, la disparition des déflecteurs sur les portières avant, remplacés par des vitres pleine grandeur. Sur la liste des options, un troisième V-8 396 de 375 ch était offert. Encore une fois, seuls les concessionnaires pouvaient être blâmés pour leur participation à l’escalade à la course au cheval vapeur. GM plaidait non coupable.
Les Camaro, modèles 1969, avaient fait les frais de nombreux changements. Sa ceinture de caisse était soulignée par des plis horizontaux, sa calandre était nouvelle, ainsi que son panneau arrière. Les phares de la RS demeuraient cachés par une trappe. Cette dernière était percée, afin que la lumière puisse la traverser en cas de panne du système d’ouverture. La planche de bord était nouvelle, ainsi que la liste des moteurs offerts.
La Camaro fut encore choisie comme voiture de tête du Indy 500, en 1969. Cette fois, Chevrolet montra son côté mercantile, en reproduisant et vendant des copies des trois Camaro construites pour cet événement. Ils en vendirent 3 475 reproductions à environ 3 500,00 $ chacune. En fait, seulement quatre étaient construites exactement comme les trois originales.