La marque Lincoln allait de réussite en réussite au cours des années soixante. Sa production passa d’environ 25 000 voitures, pour plus que doubler à près de 56 000. Ce qui avait enchainé tous ces succès a été la toute nouvelle Lincoln Continental 1961. On peut classer cette voiture comme étant un jalon dans l’histoire de la stylistique. C’était du moins ce qu’en pensait la prestigieuse Industrial Design Institure en lui décernant un prix, pour souligner la beauté de ses lignes. L’ensemble de son dessin était si bien réussi, que ses changements esthétiques annuels ont été réduits au minimum. Afin de lui conserver son apparence intrinsèque, le plus possible, les changements qui lui étaient apportés, étaient plutôt des raffinements de son dessin initial, et ce, tout au long de la décennie et même d’avantage.
Les Lincoln 1961 et les modèles 1962 et 63 avaient ravi un bon nombre de ventes à la Cadillac et même davantage à l’Imperial. Une augmentation des ventes encore plus grande avait été le résultat des changements apportés au dessin des modèles 1964. Ces raffinements de sa silhouette pouvaient la qualifier au titre de deuxième génération du dessin original.

Chez Lincoln-Mercury, ils étaient attentifs à ne pas apporter des changements, seulement pour le plaisir d’apporter des changements. C’était ce qu’ils avaient fait, en 1964. La berline et la décapotable, qui elle, était la seule berline décapotable sur le marché. Elle était de retour avec ses portières s’ouvrant par le centre, comme avant. La calandre avait été modifiée, comportant cinq barres verticales, alors que le coffre arrière avait été également modifié, tout comme les fenêtres de custode, sur les berlines. Les vitres incurvées avaient été remplacées par des vitres droites. Les changements des vitres avaient été dictés par des mesures d’économie, comme suite à une suggestion du stylicien en chef, chez Ford, Gene Bordinat. Bob Thomas, un des styliciens, qui avaient participé au dessin de la Lincoln 1961, avait été horrifié de ce changement. Selon lui, la voiture avait été dessinée pour avoir des vitres incurvées, avec des vitres droites, l’effet n’était plus le même.
Un changement plus notable était l’allongement de trois pouces de l’empattement. Ce qui le portait à 126 pouces. Heureusement, ces changements n’avaient eu qu’un effet négligeable, sur la masse de la voiture. Même allongée, cette Lincoln était encore plus courte qu’une Cadillac ou une Imperial.
L’un des avantages, de l’allongement de la voiture, était l’espace supplémentaire récupéré, pour agrandir le coffre et permettre d’entrer le toit des décapotables plus profondément dans la carrosserie, quand ce dernier était replié. L’ajout des vitres droites, malgré les protestations de Bob Thomas, permettait d’allonger 5,4 pouces de largeur à l’habitacle. Les passagers arrière avaient également plus d’espace, pour s’allonger les jambes, en plus de constater que les entrées et sorties de la voiture étaient facilitées par une portière plus longue de trois pouces. La banquette avant avait été avancée de deux pouces, ce qui donnait encore plus d’espace vital, comme disait Adolf Hitler, aux passagers arrière. Les passagers avant n‘avaient pas perdu au change, car une nouvelle planche de bord plus mince et une colonne de direction plus courte leur permettaient de récupérer les deux pouces perdus par le changement d’emplacement de la banquette avant.

Les Lincoln 1964 bénéficiaient d’une foule de nouveautés, offerte en équipement de base, tels qu’une lampe témoin indiquant le bas niveau d’essence, un volant ajustable, une lampe de lecture auxiliaire, un déclencheur automatique pour relâcher le frein de stationnement et des roues plus larges, afin de fournir un meilleur refroidissement aux garnitures de frein. La fiche technique du châssis était cependant demeurée la même, sauf pour un nouveau calibrage des ressorts et des amortisseurs. La motorisation était toujours représentée par le puissant V-8 de 430 p. c. de cylindrée et ses 320 ch. Il était toujours accouplé à la transmission automatique Twin-Range Turbo-Drive.
Le fait que l’évolution de la Lincoln Continental était effectuée d’une façon si pondérée était pour ses propriétaires un acte de foi, surtout pour ceux qui avaient abandonné Cadillac à cause de ses changements incessants. Sans doute à cause de cette foi, environ 4 000 nouveaux acheteurs s’étaient joints à la famille Lincoln, en 1964. Bien que les ventes de Cadillac avaient également augmenté, elles ne l’avaient toutefois pas fait en si grand nombre. Le gouffre entre les ventes de Cadillac et de Lincoln était encore profond, surtout à cause du vaste réseau de concessionnaires de Cadillac et du nombre de modèles offerts, qui était beaucoup plus grand que celui de Lincoln, avec seulement deux modèles offerts. Cependant, il n’avait jamais été aussi réduit, depuis de nombreuses années.
L’évolution judicieuse de la Lincoln a continué, en 1965, alors que Lincoln se rebiffait contre la tradition d’augmenter automatiquement les prix de vente des voitures, malgré l’ajout de freins à disques à l’avant sur la longue liste des équipements de base, ils demeuraient inchangés. Les modifications esthétiques avaient été apportées avec beaucoup de parcimonie. La calandre hérita de barres horizontales et d’un renflement en son milieu, alors que les feux de position migrèrent vers l’extrémité des ailes avant. À l’arrière, l’applique de métal disparaissait. Sur la liste de nouvelles options, se retrouvaient; un revêtement de vinyle à 105,00 $ pour le toit des berlines. Le climatiseur était l’option la plus populaire, avec un taux d’installation de 90 %, malgré son prix assez costaud de 505,00 $. La dernière option, à 281,00 $, était les sièges à commandes électriques.

Comme il le faisait, depuis 1961, le volume des ventes augmentait d’année en année. Le mouvement se continuait donc, pour l’année 1965, en se chiffrant à plus de 40 000, soit 3 000 de plus que pour l’année 1964. La berline a été la cause de pratiquement tous ces gains. La décapotable se vendait qu’en seulement 3 000 et 4 000 exemplaires par année.
Chez Lincoln, on avait de bonnes raisons d’être satisfait devant la progression des ventes. Naturellement, l’Homme étant ce qu’il est, les gestionnaires en voulaient forcément davantage. Toujours à la recherche de ventes encore plus nombreuses, tout le personnel, chez Lincoln, était au travail pour concevoir des Lincoln Continental encore plus grosses et encore meilleures, pour 1966.